L’idée de base de ce projet est de concevoir un préampli simple, d’un budget raisonnable, mais avec de bonnes (voir très bonnes) performances audio. Il fut initié en 2014 après avoir discuté avec un membre d’Audiofanzine qui cherchait à se lancer dans le DIY audio. Lui conseillant d’expérimenter autour des Amplificateurs Opérationnels, j’en vins rapidement à l’idée que concevoir un petit préampli serait sans doute une manière originale pour les débutants de mettre un pieds dans le monde de l’électronique audio !

C’est parce que le projet fut lancé le 31 décembre 2013 à minuit que le préampli fut nommé : le Midnight MicPre ! Vous pouvez retrouver toute l’aventure ici !

Je vous propose dans cet article de revenir sur les grands principes du fonctionnement du préampli !

Par où commencer…?

Il y a différentes technologies qui peuvent être employées pour la réalisation d’un préampli micro : transistors, circuits intégrés spécialisés pour l’audio, lampes, etc… Les transistors imposent souvent un circuit plus complexe et difficile à appréhender, les tubes imposent une réalisation coûteuse (alimentation haute tension notamment…). Il y a bien des circuits comme le THAT 1210 ou le SSM2019, le INA217, etc… qui sont des puces qui intègrent un préampli micro complet et n’ont besoin que de très peu de composants pour fonctionner. Mais la mise en oeuvre de tels composants n’est finalement que l’application du datasheet du constructeur, et ce n’est pas très pédagogique comme démarche… 

J’ai donc choisi de créer le circuit à partir d’Amplificateurs Opérationnels, des petites puces à 8 pattes (ou plus…) que l’on peut trouver pour un prix très raisonnable, certains modèles étant particulièrement adaptés à l’usage audio. Il s’agit d’un circuit intégré qui peut réaliser toutes sortes d’opérations mathématiques : addition, multiplication, soustraction, intégration, comparaison, etc… selon sa mise en oeuvre. Un préampli micro nécessite essentiellement du gain, c’est-à-dire la multiplication du signal entrant par une constante (qui est la valeur du gain du préampli).

Le Midnight MicPre peut se décomposer en 3 parties :

  • Etage d’entrée symétrique (avec PAD, inverseur de phase, gestion de l’alimentation Phantom, désymétrisation)
  • Etage de Gain actif
  • Etage de sortie (resymétrisation, avec faible impédance de sortie pour attaquer une ligne audio standard de niveau LIGNE).

Voyons en détail comment chaque partie est réalisée !

Etage d’entrée

L’entrée du préampli se fait sur une prise XLR, qui véhicule un signal symétrique (point chaud +, point froid -, et masse).

Le premier élément du trajet sur l’entrée est le Switch du PAD qui peut atténuer le signal de 20dB. Cela peut être nécessaire sur des sources très puissantes (batteries, ampli guitares, etc…). Le PAD doit être placé très en amont dans le circuit car un signal trop fort peut faire saturer les étages suivants ! Il est simplement constitué d’un switch DPDT (2 pôles 2 positions) et de 3 résistances :

Quand le switch est en position haute, toutes les résistances deviennent inopérantes et le signal passe comme dans un simple fil. En revanche lorsque le switch est en position basse, le PAD s’active, réalisant une atténuation de 20dB environ sur le signal entrant.

La 2eme étape consiste à injecter le 48V dans les branches + et – pour les micros nécessitant une alimentation Phantom. Pour ce faire on va d’abord filtrer avec une cellule RC l’arrivée +48V de l’alimentation (ceci afin de bien découpler chaque préampli dans le cas de l’utilisation de plusieurs préamplis sur une même alimentation. Le condensateur est aussi une source locale d’énergie dans laquelle le micro peut venir puiser en cas d’appel subit de courant. La distribution du 48V ainsi filtré est réalisée par 2 résistances de 6k81. Il est important que ces résistances soient de valeurs identiques. Le 1% est vraiment obligatoire ici, 0,1% encore mieux !

Lorsque l’alimentation Phantom n’est pas utilisée le switch connecte la jonction des résistances 6k81 à la masse.

Nous avons donc dans l’ordre : l’entrée XLR, le PAD, l’alimentation Phantom. Voici l’élément suivant : le transformateur.

Le transformateur d’entrée est un élément fondamental du préampli. Il va remplir différents rôles :

  • désymétriser le signal d’entrée
  • isoler l’entrée du préampli de la sortie (évite ainsi d’éventuelles boucles de masse, buzz…)
  • filtrer les radio-fréquences
  • apporter du gain libre de bruit de fond (gain apporté de manière passive, contrairement aux éléments actifs qui avec le gain amènent immanquablement du bruit de fond !)
  • modifier l’impédance entre son entrée et sa sortie.

Le transformateur n’est jamais parfait, même un transfo haut de gamme et très cher. Il va avoir ses limites en réponse en fréquence, résonnances dans les hautes fréquences, etc. Ce sont toutes ces imperfections qui font que chaque transformateur audio va avoir un impact non négligeable sur le rendu sonore. Ainsi le choix du modèle de transformateur va donner une personnalité différente au préampli. Dans notre cas, nous utiliserons un transformateur d’un ratio 1:10. Cela signifie que le signal sortant du transfo sera 10 fois plus grand que le signal entrant. Pour 1mV en entrée on trouve donc 10mV en sortie. Nous avons donc d’emblée un apport de gain très appréciable !

En effet multiplier un signal électrique par 10 revient à ajouter 20 log (10) = 20dB au signal entrant. Ce n’est pas suffisant pour un micro, mais c’est déjà un bon début.

Il faut bien comprendre qu’un transformateur, composant passif (pas d’alimentation électrique), ne peut pas “fabriquer des volts”. S’il est capable d’augmenter la tension à sa sortie c’est au prix d’un “affaiblissement” de l’énergie contenue dans le courant. On parle d’impédance.

Une faible impédance correspond à un signal “solide”.

Une forte impédance correspond un signal “fragile”.

On peut prendre une analogie mécanique. Lorsqu’un moteur d’une puissance donnée fourni un mouvement à une petite poulie, il peut être difficile d’arrêter la rotation de la poulie avec la main. En revanche si le même moteur de même puissance entraîne une grande poulie, il devient plus facile de la freiner. Plus la distance du centre de rotation est grande (=>impédance en Ohm) plus la vitesse (=> tension en Volt) est grande, mais on sent bien instinctivement qu’il sera plus facile de freiner la poulie à la périphérie (loin du centre) que près du centre. C’est la même chose avec un transformateur : le signal qui en sort, s’il est plus élevé en Volt, possède une impédance plus élevée qu’à l’entrée, selon la formule :

Zout = Zin * A²    (A représente le ratio des bobinages du transfo)

Dans notre cas, avec un transformateur d’un ratio 1:10 nous obtenons un ratio d’impédance de 100. Ainsi l’impédance de sortie du transformateur sera 100 x plus élevée qu’à son entrée, alors que la tension sera multipliée par 10.

Un micro possède généralement une sortie à faible impédance, justement pour que le signal qui sort du micro soit “résistant” à la liaison (longueur du câble) avec le préampli, et que ce signal ne soit pas (ou très peu) influencé par la liaison et l’entrée du préampli. Il convient, pour que le maximum de tension du signal de sortie soit transféré au préampli, que l’entrée de celui-soit soit d’une impédance au moins 10 fois suppérieure à celle de la sortie du micro.

Le micro sort à environ 150 Ohms, il nous faudra donc à l’entrée du préampli environ 1k5, et donc après le transfo 150K. C’est la raison pour laquelle une résistance de charge de 150K est placée juste après le transformateur. Celle-ci va imposer une charge qui va se “refléter” à traver le transformateur et assurer un bon transfert de la tension entre le micro et le préampli.

Sur le schéma ci-dessus on voit l’analogie entre la liaison micro/préampli et un diviseur de tension. Si Zs est petite devant Zc alors un maximum de tension sera transféré au préampli (c’est ce que l’on recherche !). Au contraire, si Zs est élevée et Zc petite, la tension à l’entrée du préampli sera faible voire très faible. On voit bien alors comment les impédances source/récepteur interragissent et pourquoi on cherche toujours à avoir des impédances de sortie faibles, et d’entrée assez élevées !

Revenons au Midnight MicPre ! Voici donc le schéma de l’étage d’entrée complet :

Etage de Gain

Une fois le signal du micro désymétrisé par le transformateur, il va attaquer la partie active du préampli. Après différentes expérimentations et comparaisons, j’ai choisi d’utiliser l’amplificateur opérationnel OPA134 pour la partie “gain” du préampli. En effet c’est un AOP avec des caractéristiques très bonnes pour l’audio. L’entrée sur FET lui permet de gérer notre impédance relativement élevée en sortie du transformateur (150K) sans souci.

Dans le Midnight MicPre l’AOP est monté en non inverseur : le signal entre sur l’entrée non inverseuse (+) et la sortie est donc en phase avec l’entrée. Le gain du circuit est donné par les valeurs de 2 résistances qui forment un diviseur de tension dans la contre réaction de l’AOP. En modifiant la valeur d’une des résistances on obtient différentes valeurs de gain.

Le gain est donné par la formule : Gain (dB) = 20 log (1 + 22100/Rg)       Rg exprimée en Ohms

Ce qui nous donne par exemple les 12 valeurs suivantes :

Il faut bien comprendre qu’il s’agit uniquement du gain apporté par l’AOP. Ce gain doit s’additionner au gain “passif” du transformateur (+20dB pour un ratio 1:10).

Etage de sortie

La sortie du OPA134 est à basse impédance et capable d’alimenter une liaison audio conventionnelle, sauf qu’elle n’est pas symétrique ! C’est pourquoi nous allons utiliser un composant de plus, le NE5532 qui est un double AOP dans un seul boîtier, afin de symétriser la sortie du préampli. Pour ce faire c’est très simple :

– le signal amplifié du OPA134 passe dans un premier AOP inverseur => point froid (inversion de phase par rapport à l’entrée)

– la sortie de ce montage inverseur, en plus d’être reliée au point froid alimente le 2eme AOP inverseur => point chaud.

On a ainsi 2 signaux identiques mais de polarités inversées, donc une sortie symétrique ! Dans cette configuration les AOP travaillent à gain unitaire : ils ne modifient pas la valeur de la tension du signal, il ne font qu’abaisser l’impédance et inverser la polarité.

Enfin, pour terminer, se trouve l’inverseur de phase qui est un simple Switch DPDT (identique à celui utilisé pour le PAD) qui va simplement échanger point chaud et point froid :

Voilà ! Nous sommes arrivé au bout du design du préampli ! A présent vous avez tout en main pour réaliser à moindre coût un petit préampli d’excellente facture. Vu la simplicité du schéma, il est possible de le monter sur une plaque à pastille perforée. Mais pour ceux qui veulent la simplicité vous pouvez retrouver le PCB sur la boutique. Un Kit complet est aussi disponible.

Recevez la newsletter !

Recevez la newsletter !

Inscrivez-vous afin d'être tenu informé de toutes les actualités du blog et de la boutique Delta sigma !

Bravo ! Vous recevrez à présent la newsletter !